mercredi 13 juillet 2005

ZOne des plaines






Il fait chaud très chaud ... Voilà deux heures que nous rôtissons sur le bord de la piste du circuit de Pau-Arnos. Je porte le regard vers les montagnes qui semblent si fraîches, qui nous attirent. Dernier tour de piste des Junior Cup, nous allons pouvoir enfin prendre la route. Un au-revoir de reconfort à Ditch, et nous remettons difficilement casques et blousons. Ils sont devenus insupportables de chaleur.Il va falloir rouler pour tenter de refroidir tout cela.

El Azul n'a jamais connu de montagne, et moi-même n'ai d'expérience à moto que sur les monts élevés mais doux de l'Auvergne. Je n'aime pas trop l'idée de la moto à ce moment précis. J'ai encore du mal à sentir la machine. Mais docile, j'emboîte la roue de mon guide, direction Oloron Sainte-Marie. J'ai déjà parcouru cette route. Je sais qu'il n'y a pas de pièges à proprement parler, que les virages s'enchaînent comme les jours de pluie dans mon pays. Cependant, la chaleur, la fatigue, quelque chose de non définissable m'empêche de me sentir à mon aise. Je ne comprends pas la moto. Je contrains bien trop souvent le moteur aux environs des 6.000 tours par crainte de voir la bête s'emballer. Je respire mal derrière la visière. Les yeux piquent. Oloron enfin et ses rues en pente. Je me souviens qu'ensuite vient des portions plus droites. j'essaie de mieux coller à la route en direction de Laruns.

Contrairement à notre habitude, nous passons devant le café sans prendre le temps d'une crêpe. Le soleil est au zénith et il nous faut rapidement nous éloigner de la torpeur de la plaine. Arrêt sans prévenir au parking de la fourche. Je manque de mettre la moto par terre. J'angoisse secrètement de la montée, et surtout de la descente. J'ai été prévenue des épingles. Je me dis que ce n'est pas plus difficile qu'une sortie rapide de rond-point. Mais le coeur n'y est pas. Je serre les dents, un sourire et c'est reparti. La route devient toujours plus sinueuse vers Eaux-Bonnes.

Et là très bonne suprise : le bitume a été refait récemment. C'est lisse, c'est propre, ça accroche et ça remet un peu de confiance dans mon moteur. Les arrêtes du pneu carré s'effacent encore un peu plus, je trouve le meilleur régime pour enchaîner les virages sans devoir me battre avec la moto. Nous dépassons largement l'épingle qui nous avait vus rebrousser chemin pour cause de neige cet hiver. Je commence enfin à faire corps avec la moto. Le moteur respire à plein poumon de l'air devenu frais. Je suis ravie d'avoir conservé mon équipement complet.

Quand tout d'un coup nous voilà à longer un ravin . Je serre le milieu de la chaussée le plus possible. A force de regarder obstinément la moto qui me précède et la route en avant, j'en avais presque oublié les précipices. Le premier moment de stupeur passé, je me concentre d'autant mieux sur la route qui nous conduit au col d'Aubisque. Je suis un peu inquiète car la descente dans l'autre sens me semble insurmontable. J'ai peur du vide, et moto ou pas j'ai peur ! La vue du sommet est belle, reposante, même si le ciel est un peu bouché. Nous apprécions à sa trèsjuste valeur la dizaine de degrés de moins par rapport au pied de la montagne. Nous nous offrons un chocolat chaud dans l'un des deux cafés refuges du sommet. On se croirait dans un film des Bronzés !

La descente sera fera bien heureusment du bon côté de la montagne par le col du Soulor. Ici la route appartient aux nids de poules, aux brebis, et aux touristes qui se crééent des souvenirs de vacances en photographiant des vaches dont les petits finiront dans leurs asssiettes. La corniche du cirque du Litor est vertigineuse. D'aucun diront belle, mais je revendique le droit de ne pas être de leur avis ! Je suis sur le qui-vive, le moteur ronfle et j'ai la main et le pied droits prêts à intervenir. J'aurais même peur de mon ombre tellement je suis tendue ! J'aperçois une forme rouge dans mon rétroviseur. Un cycliste. Je le laisse passer et il file me laissant sur place avec mes angoisses de chute. Mon guide doit fulminer sous son casque mais patiemment adapte son allure à la mienne.

Enfin, la pente se fait plus douce, mais ô catastrophe, la route est parsemée de rustines gravillonnées. Je respire à nouveau moins bien. Il est vrai que je viens de respirer durant quelques heures à la sortie du pot d'échappement de la moto ouvreuse. Une quatre-voies s'offrent alors à nos pneus et El Azul peut enfin se libérer de tant de bride ! Sur la route qui nous mène de Lourdes à Pau, j'ai le sentiment, l'heureuse sensation, d'avoir compris quelque chose de ma moto.